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Socrate , Jésus , Bouddha et Lao Tseu

Nous partons ici du livre de Frédéric Lenoir : Socrate , Jésus , Bouddha ,

trois maîtres de vie , auquel je joins un quatrième avec Lao Tseu .

 

Reprenons les conclusions de Frédéric Lenoir  qui prévalent aussi

bien pour Lao Tseu:
loin de s'opposer , les préceptes de ces quatre maîtres  ne
cessent de renvoyer l'un à l'autre ..
Chacun à sa manière ils ont invité les humains à vivre les yeux
ouverts , en communion joyeuse les uns avec les autres ...
Ils incitent  chacun à prendre conscience de ses limites tout
en montrant sans cesse la voie d'un dépassement et d'un progrès
Ils n'ont cessé de vivre en dehors des normes et des dogmes de
leurs époques , en recherche constante d'un "vrai" qui n'a de
sens que si ce vrai permet d'agir de manière bonne ...que si
ce vrai est mis en pratique dans le quotidien ,comme ils en ont
montrés l'exemple eux-mêmes .
Ils ne proposent pas un bonheur "clef en main" , des règles et
des principes qu'il suffit d'appliquer les yeux fermés pour
mériter un "salut" , ils proposent une voie de travail , un
élargissement constant de la conscience , une quête permanente
et insatiable de cet élargissement pour aller vers une
libération des illusions qui nous entourent ( nous les appelons
dans notre langage contemporain des "stéréotypes" individuels
ou sociaux , des codifications qu'on applique mécaniquement ,
qui subsistent quand leurs raisons d'être n'est plus qu'une
question d'autorité , etc ...) .
Et tous manifestent une joie de vivre qui va toujours au-delà
des frontières fermées d'horizons individuels , pour se mettre
de plain pied avec les autres , au point que leur statut
personnel leur paraît secondaire  , au point que leurs propres
vies , si elles doivent être mis en jeu est aussi secondaire
par rapport à leurs enseignements .   

quand on jette un regard avec un certain recul sur notre époque
nous pouvons avoir le sentiment que le moule de la pensée unique
du politiquement correct , de la langue de bois , du discours
appris et récité avec plus ou moins de réussite , des
proclamations des "zexperts" et des "zélites" n'ont jamais été
si prégnants dans une société , et si mal employés ...Cette
perception serait vraie et fausse à la fois , car c'est un
phénomène qui a eu lieu à toutes les époques,...du moins dans
les époques historiques .
Si le "parler vrai" paraît de plus en plus un "gros mot" , soyons
averti que cela a souvent , sinon toujours , été le cas .
La recherche de la "vérité" et le parler "vrai" ont souvent
condamné leurs disciples à être en butte à la morale établie
( rappelons que morale veut dire étymologiquement que l'on agit
selon les "moeurs" de son époque ...et que le mot de "moral" a
plus ou moins été remplacé par celui de "politiquement correct"
à notre époque, ce qui revient finalement au même , au prix
d' une adaptation de vocabulaire : la forme change , pas le
fond) .
Nos quatre adeptes du "parler vrai et joyeux" que sont Lao Tseu
Socrate , Jésus et Bouddha , ont connu ces difficultés et se
sont soit retirés de la vie publique et politique ( Bouddha
et LaoTseu) , soit ont continué à interférer avec la vie publique
et politique ( Socrate et Jésus)et l'ont payé de leur vie (ce
qu'ils considéraient comme secondaires par rapport à leurs
liberté de penser et de se comporter)

 

Derrière les mythes , ou les propos déjà évoqués ci-dessus ,
quels sont les points communs de ce qu'on peut appeler leurs
"enseignements"?

principe premier : ouvrir de plus en plus son esprit à son
environnement , au monde , en quête d'une forme d'universel ,
par un élargissement sans cesse revendiqué de la conscience ,
par un cheminement sur la voie de la compassion , de l'amour,
de l'effacement de soi (de "l'ego") :
effacer l'ego , effacer les écrans des illusions qui nous font
des obstacles et des barrières et nous cantonnent dans une
"facilité" du quotidien au prix de beaucoup de "difficultés"

à venir ( la "roue des illusions" que la tradition indoue appelle

le"Samsara", et qui nous enchaine à son manège) .
Si nous voulons progresser vers plus de liberté , d'autonomie
( sans même parler de salut ou d'éveil , ou en en parlant pour
ceux qui le veulent ) , il faut se dégager de ces illusions et
de leur confort à courte vue , des certitudes "en kit" . Il faut
effacer cette complaisance à appliquer mécaniquement des dogmes
sans les comprendre , cette complaisance à se couler dans des
habitudes  bien répertoriées qui  ont reçu l'aval des
"autorités" : tout ce que je sais , c'est que je ne sais rien
dit Socrate , et Lao Tseu lui répond :
"Savoir et douter de son savoir , voilà l'excellence
Ne pas savoir et présumer de son savoir , voilà l'erreur
C'est en étant conscient de son erreur  qu'on peut la corriger"  
( aphorisme no 71) .
Evidemment , cette attitude  a un coût social et nos quatre
maîtres ont empruntés le chemin d'une pauvreté , nécessaire
pour Bouddha ( "il faut se libérer de l'attachement à posséder")
pas suffisante dit encore Socrate.
"Il est plus aisé pour un chameau de passer par le chas d'une
aiguille que pour un nanti de gagner le paradis" semble être
un point d'accord général entre nos quatre personnages
( Matthieu XIX 24 ).
Ouvrir la conscience en se libérant de plus en plus de son "soi"
et plus précisément de son "quant-à-soi" semble bien être une
condition absolument indispensable pour les quatre .

 

deuxième principe :
Si l'image de la caverne de Socrate nous rappelle que nos
connaissances ne sont qu'un lointain reflet de ce qui peut
être , il serait convenable de sortir de cette caverne pour
aller à la rencontre du monde . Encore faut-il savoir que le
chemin est long , et pour reprendre l'image de Socrate , que
l'avancement vers la lumière du dehors en sortant de nos abris
est risqué , demande des efforts constants et résolus , et ne
peut se faire que petit à petit pour habituer progressivement
nos yeux à tous les éblouissements extérieurs .
Je ne suis qu'un taon qui vous aiguillonne , un poisson torpille
qui vous électrise pour essayer de vous donner une impulsion ,
dit Socrate , à vous de vous mettre en marche selon votre rythme
           Sortir , pour quelle destination et quel destin ?


Pour Bouddha , la destination et l'énergie du mouvement sont à
trouver dans une compassion générale pour tous les êtres vivants
, des plus modestes aux plus élaborés . Il ne s'agit pas d'une
compassion "égoïste" dans le but d'atteindre "son éveil
personnel" (puisque l'ego se doit de disparaître) , mais d'un
état où l'être est progressivement imbibé , envahi de ce
sentiment de compassion qui fait évanouir les barrières du soi
et laisse jaillir son élan vers le monde , comme une source qui
s'est dégagée de sa gangue de terre et coule  libérée et
spontanée : la spontanéïté se trouve en avançant , comme
l'allure en marchant , si on ne la trouve pas , c'est qu'on est
sur le mauvais chemin ou au mauvais pas .

 

Pour Lao Tseu , il s'agit de s'inspirer , puis de tendre ou
d'être dans la voie du Tao :
Qu'est-ce que le Tao ? C'est en quelque sorte le mouvement de
l'univers , son souffle , son élan et son énergie , de la plus
petite parcelle de matière jusqu'aux plus indiscernables
perspectives. Citons l'aphorisme 14 évoquant le Tao :

 

Haut , il n'est pas éclairé \ Bas , il n'est pas obscurité
Myriade d'effets  , on ne peut le nommer
Ainsi étant et insubstantiel\Forme sans forme , image sans image
fugitif et insaisisable .
Au devant on n'en voit pas la  tête
à l'arrière , on n'en voit pas la fin

 

Qui se laisse guider sur la voie du Tao
saura garder le cap dans les heurts du présent
Qui saura reconnaître l'origine de tout
aura en main les fils du Tao

 

Accompagner le Tao dans son souffle et sa respiration , en étant
ouvert et sensibilisé à toute forme d'être ou d'état , dans ce
qu'on peut appeler une compassion générale pour toute forme
d'état et même de non-état (de ce qui peut advenir comme de ce
qui s'est passé), voilà la voie du Tao et la voie de la paix
profonde .

 

pour Socrate , comme pour Bouddha ou Lao Tseu , il s'agit de
trouver en son intérieur la force qui préexiste (par la
méditation nous dit Bouddha , par la sensibilité nous dit
Lao Tseu) : par l'écoute  nous dit Socrate , de cette voix
intérieure qu'il appelle le "daïmon" , qui est plus un
compagnon de route qu'un guide , et  dont la voie conduit
à l'élévation , à la sérénité et à la joie .
Il y a un impératif à ce cheminement intérieur : adopter un
comportement de justice la plus complète envers quiconque ,
préférer subir l'injustice que de la commettre , étant
entendu que celui qui commet une injustice ou un acte
délictueux en supportera de son propre fait les conséquences
futures (  un peu dans la tradition de l'ubris grecque , de
cette démesure qui gonfle d'importance jusqu'à éclater d'un coup
d'épingle ; comme pour Bouddha en quelque sorte , où le prévenu
s'enchaîne toujours un peu plus à la roue des conséquences de
ses actes ).

 

Pour Jésus , un chameau passera plus facilement par le chas
d'une aiguille que le "nanti" (plus que le riche) atteindra le
paradis . Par "nanti" , on peut convenir qu'il s'agit aussi
bien des "gardiens du temple" que des "marchands du temple"
que Jésus est obligé de "chasser" , et de l'hypocrisie
générale dont s'inspire les "pharisiens" .
Une faute à la sincérité des actes est un élément non pas
impardonnable , mais un élément de sortie de route aussi
imparable que l'est un acte de violence pour Bouddha ou
un acte d'injustice pour Socrate  , aussi enfantin que la
raideur de celui qui croit s'opposer à un équilibre du Tao
Pour Jésus , le mouvement du monde est régi par un amour
universel qui touche dans la plus parfaite égalité tous les
êtres ( dans la plus parfaite justice dirait Socrate) et se
mettre en travers de cet élan est aussi peu pourvu de sens
que de prétendre ébranler un équilibre mis en place par le
Tao ; c'est un acte de démesure pour les grecs , un acte
"insensé" .

 

Les destinations proposées par ces quatre "maitres de vie"
(comme le dit Frédéric Lenoir) ayant été très rapidement
évoquées il reste à chacun de trouver le destin auquel il
aspire , d'avancer dans la quête de sens qu'il pourrait
trouver à sa vie , étant entendu que ces quatre maîtres
ont tous mis en garde contre les manques de sincérités qui
peuvent jalonner le cours d'une activité , et les
conséquences que des actions d'opérette ou "insensées"
peuvent avoir .                       

                                                                phirey@free.fr

 

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