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Innocence du monde (2)

Et si Socrate revenait
pour s'assoir tout à nos côtés
que dirait-il de tant d'années ,
des successions ou  des succès ?

 

De nos temps si circonstanciés
si disjoints et si fragmentés
de nos écrans préfabriqués
aux élans cinématisés ?

 

Il n'est d'autre présupposé
que d'écarquiller la conscience
à l'observation des marées ,
des vies dans leurs plus folles danses

 

 Hors des courants accommodants
plonger au coeur de mille matins
où il n'y a d'autres destins
qu'un jour en son commencement

 

Où il n'y a d'autres chemins  
que de créer chaque moment
dans le détour de chaque instant
à profusion de chaque brin

 

Qu'à profusion de chaque chant
dans le cours de mille courants ,
qu'à profusions de tourbillons
dans le cours de mille évasions                     Septembre 2018

 

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concepts pour "brûler" en indo européen


Ces 4 racines principales pour "bruler" attestent de l'importance du feu dans
les pratiques journalières des premières sociétés , et des fortes
ramifications de ses incidences dans la vie des populations .

1) La racine "ai-dh" a donné les mots latins aestus ( chaleur ,
bouillonnement) , et aestas ( l'été) , qui en français ont donné la
famille des mots d'été ( été , estivant , estival , estiver ...) mais
aussi estuaire , estran , étier , étiage :
L'estran est la bande de terre découverte par la marée basse , la zone
de battement de cette marée , sens que le mot estuaire avait à l'origine
( soit aestuarium en latin) : le rapport avec la chaleur et le
bouillonnement ? Le bouillonnement de la marée ..
Etier est le canal conduisant l'eau de mer dans les marais salants ,
"étiage" est le niveau d'été d'une rivière .

On retrouve ensuite cette racine dans Aetna ( puis Etna en français ) ,
aether ( puis ether en français) .

Une autre bifurcation de cette racine s'observe dans les mots latins
aedes ( maison , temple , c'est à dire "place avec un foyer") ,
aedificatio ( édification) , aedilis ( personne chargée des bâtiments
publics) , qui ont donnés en français :
édifice , édifier , édifiant , édification ... puis édile ( dont la
fonction s'est élargie depuis la gestion originelle des bâtiments
publics...) .

 

2) La deuxième racine est "eus" qui conduit aussi bien à urticaire et
ortie , qu'à combustion et bruler .
Le "s" qui se transforme en "r" en latin est appelé un phénomène de
rotacisme très classique : le verbe primitif était "uso" , qui s'est
transformé en uro ( participe passé ustus) : bruler .
D'où urticaire , ortie (urtica en latin) , urticant , .., puis les mots
utilisant le radical "ur" de uro , comme comburant , ou "ust" , comme
combustible , combustion , ..
Le passage à "bruler" est un peu plus compliqué :
le radical est per+uro ( bruler de part en part) , transformé en
perustare puis prustare ( italien bruciare : bruler), puis en diminutif
prustolare , devenu brustlar et enfin brûler ( et par réforme
grammaticale de 1990 : bruler !) ..

 

3) troisième racine : "keu" , de caustique à encaustique , de encre à
ink en anglais , de holocauste à chômer ....
Là , l'origine des mots français est essentiellement le grec :
soit kaio(bruler) , kausticus (brulant) , kauma ( chaleur) ...qui ont
donné caustique ( voire soude "caustique") , holocauste ( on brulait
l'offrande aux dieux ) , et... calma ( mer calme par forte chaleur)
puis calme ...
Quand il fait chaud , la mer est calme ... mais aussi on se repose :
d'où la "chôme" des troupeaux de moutons par temps de fortes chaleurs ,
, chômer , chômage .
Le passage à encaustique et à encre correspondait à la fabrication des
couleurs dans l'antiquité : là , il s'agit du procédé de brulure de
certains coquillages (par exemple des Murex) , qui donnait un pourpre
plus ou moins sombre ; mélangé à l'eau , la poudre donnait une teinture
de coloration : l'encre pourpre ( sacrum encaustum , réservée à
l'empereur) , ou les teintures des toges des hauts responsables , voire
ensuite la pourpre "cardinalice" ( le procédé coûtait très cher ..).
Puis "encaustum" en devenu encre ( ink en anglais).
Les procédés de coloration se développant , on utilisa la cire pour
certaines techniques de peintures : cela devint "l'encaustique".

 

4)quatrième racine pour bruler : "ker" , de carbone à crémation , de
charbon à céramique .
En grec , keramos veut dire argile , poterie : l'usage du feu est ici
tourné vers les fours à cuisson de l'argile .
En français , c'est l'origine de "céramique"
En latin , la racine a donné carbo (braise , charbon de bois) ,le verbe
cremo (bruler) : d'où en français : carbone , charbon , carbure , ...
carburant , crémation ...

 


L'usage de ces 4 racines n'épuise pas le lot des racines indo
européennes qui signifient "bruler" , mais il s'agit ici de 4 des
racines principales conduisant à ce concept .
On voit déjà , sur cette base , toute la diversification qui est
intervenue sur l'usage et la création des mots , de "édifice" à
"encre" , en passant par céramique , charbon , chômage , caustique
ou encaustique , de l'été à l'estuaire ....

 

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Innocence du monde

Plénitude diaprée , opulence d'échos
Chamarres de frissons dans les reflets de l'eau
Kaléidoscope de couleurs et de bruits
offrant à profusion ses tourbillons de vie

 

Frénésie des courants aux berges des matins
Quadrille exubérant des voltes des oiseaux
Embrasement du monde en gerbes de refrains
Ivresse oscillant en des élans nouveaux

 

Rutilement des neiges inondées de soleil
aux confluences de montagnes et du ciel
Innocence lustrale aux portes des réveils
au confins d'un regard , au bord d'une étincelle         Août 2018

                                                                                    phirey@free.fr

 

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Cest l'exception qui confirme la règle : question d'échelle et de localité

C'est l'exception qui confirme la règle ....

A la mesure de ces propos , on peut se demander si toute règle admet des

exceptions et jusqu'à quel degré d'exceptions une règle admet un fondement

véritable . Pour cela , examinons ce qu'il en est dans les domaines des sciences .
Dans un monde à notre échelle , qu'on peut opposer aux mondes de l'infiniment

petit et de l'infiniment grand , ou aux mondes très antérieurs au notre , les

grandes lois des sciences physiques n'admettent pas d'exceptions :
ainsi en est-il pour la loi de la gravité ( encore que...cf  périhélie de Mercure )
, les lois d'Ohm , de la conservation de l'énergie , de la thermodynamique , etc.. .
Dans ces domaines , une seule  exception suffirait à invalider la règle .
Observons toutefois que ces lois sont essentiellement "locales" , c'est à dire
valides à notre échelle , de temps et de lieu ; l'exemple de la loi de Hubble est
très éclairant à cet effet . Cette loi de Hubble précise qu'actuellement , toutes
les galaxies de l'univers s'éloignent les unes des autres à une vitesse qui est
proportionnelle à leurs distances respectives ; une galaxie deux fois plus

éloignée de notre galaxie qu'une autre s'éloignera deux fois plus vite de notre

galaxie (Voie Lactée ) que la deuxième .
Cette loi se traduit en termes mathématiques de façon très simple : si l'on

appelle d la distance de 2 galaxies et d' la vitesse d'éloignement de ces galaxies

( d' est la "dérivée" de d par rapport au temps) , alors  d' = Hxd , où H est une

constante , dite constante de Hubble .
La résolution élémentaire de cette équation ( différentielle ) donne comme

solution d = A exponentielle(Hxt) , où t est la variable "temps" et A une autre

constante. De la sorte , on aboutirait avec la valeur de H actuellement évaluée

( à peu près 70 km/seconde/ megaparsec ) à une expansion de l'univers

"exponentielle" , ce qui est bien entendu en contradiction évidente avec ce qui

est observé .

Ainsi le loi de Hubble et sa constante ne sont valables que pour "notre époque" ,
soit environ 13,5 milliards d'année aprés le Big Bang ; le loi de Hubble est bien

une loi "locale" ( propre à notre environnement actuel) , qu'il faut bien se

garder de généraliser comme une loi "universelle ", valable à toute époque .

Ainsi validées comme des lois "locales" ( propres à notre environnement

temporel et spatial ) , les lois physiques n'en restent pas moins  des lois qui

n'ont pas d'exception à notre échelle de lieu et de temps  .

Mais passons à une autre échelle de lieu , dans le domaine de "l'infiniment

petit" ; ce domaine est celui où s'applique la physique quantique : là , tout est

du domaine des probabilités , c'est à dire qu'à cette échelle , tout est du

domaine de l'exception ; un phénomène se manifeste par exemple avec une

probabilité de 80% , c'est à dire avec 20%  d'exceptions .
Un exemple est celui de "l'effet tunnel" qui se passe en particulier au centre du
soleil pour produire l'énergie qu'il dispense . Le soleil est essentiellement une
boule d'hydrogène qu'il  transforme par des réactions de fusions nucléaires en

hélium Chaque seconde , c'est environ 620 millions de tonnes d'hydrogène qui

se transforment en 615 millions de tonnes d'hélium , la différence de 5 millions

de tonnes étant de la masse qui se transforme en énergie ( E = mc^2) .

Actuellement ces réactions ont produit environ 25% de la masse solaire en

hélium , il reste encore les  3/4  de  la masse solaire comme combustible ...

On est tranquille pour quelques temps...

Or , à la température centrale du soleil , ces réactions seraient impossibles ,

deux protons H chargés chacun négativement ne pouvant que se repousser .

Pour fusionner , il faudrait qu'ils entrent pratiquement au contact l'un de l'autre 

et qu'alors l'interaction forte qui "colle" les particules puisse agir . Franchir la

barrière qui les repousse étant "impossible" , que font les deux protons pour

se rapprocher et fusionner grâce à l'interaction forte ? Ils "creusent" un

tunnel dans la barrière séparatrice ! Ce phénomène d'effet tunnel est un des

multiples exemples des exceptions qui jalonnent les lois de la physique

quantique : sa probabilité est très faible , mais multipliée par l'innombrable

quantité de protons en présence , il se produit quand même ( et avec lui 615

millions de tonnes d'hélium par seconde au coeur du soleil !).    Ainsi , tout

est une question d'échelle ( de lieu , de temps , de domaine examiné où se 

font les observations ).

Prenons un autre  exemple :
Les systèmes qu'on appelle chaotiques sont des systèmes physiques

extrêmement sensibles au conditions locales ( conditions "initiales") , où la

moindre modification des conditions locales peut avoir de très importantes

conséquences . Ainsi en est-il dans le domaine des prévisions

météorologiques : de très minimes fluctuations ( non mesurables par les

instruments de météo ) peuvent entraîner des changements très importants

du climat , ce qui rend ces prévisions météo aléatoires au-delà d'un certain

temps . Cependant , ces systèmes chaotiques admettent souvent des

"attracteurs" , qui sont des zones vers lesquelles le système peut converger

au bout d'un certain temps . Dans les domaines météorologiques , cet

"attracteur" est le climat d'une région .On connaît bien ces climats régionaux ,

les climats océanique , continental , méditerranéen sont bien identifiés , les

caractéristiques bien établies . Ainsi , si les prévisions météo à l'ordre d'une

quinzaine de jours sont dans  la pratique impossibles à réaliser , des

prévisions moyennes sur le long terme sont assez accessibles : en été il

fera très chaud en climat continental , mais et il pourra y avoir de très gros

orages , par exemple .

Là encore , tout est une question d'échelle , ici c'est une échelle de temps ,

des lois peuvent avoir un grand nombres "d'exceptions" à une  certaine 

échelle  de quelques jours , beaucoup moins à une autre échelle .   

 


En définitive , rien n'est définitif ..tout est une question de localité , de lieu
de temps , une question d'échelle d'observation , voire d'équilibre entre des

forces "contraires" comme indiqué dans un article précédent .
Sans oublier , non plus , que les "lois" décrivant un phénomène peuvent

ne pas être uniques ( cf article sur la "sous détermination de la théorie par

l'expérience") , et que ces "lois" sont essentiellement à vocation prédictive ..
"Vérités" dans "l'infiniment petit" , erreurs ailleurs ...et réciproquement !  

phirey@free.fr

 

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La racine indo-européenne (s)teu : de studieux à stupeur , en passant par stupre , tympan , type , ratatouille ...

La signification première de cette racine indo-européenne est "pousser ,
frapper, faire un effort " : on trouve ainsi les verbes latins tundo
(frapper , écraser) et contundo ( broyer , écraser) , avec un "d"pour
suffixe , qui ont donné en français contusion et contondant ;
en grec , on a tupos (coup , empreinte , marque , caractères gravés)
et tumpanion (petit tambour) qui ont donné en français type ,typographe
, archétype , tympan (on grave un caractère en frappant avec un burin
et un type est un caractère de référence ; le son d'un tambour se fait
par battements et le tympan est un "petit tambour") .

Recevoir des coups peut faire naître un étourdissement , de la peur :
on a ainsi les mots grecs stux ( peur , frisson) et latins stupeo (être
étonné , immobile de stupeur / admirer ) , stupidus ( frappé de stupeur
, stupide ) , qui ont donné dans le langage habituel :
Styx ( fleuve des enfers , qui inspire la peur ) , stupeur , stupide ,
stupéfait , stupéfaction , etc...

Comme frapper , broyer n'est pas nécessairement faire violence ( broyer
des grains pour faire de la farine , frapper avec un burin , etc..) ,on
a aussi dans la racine la signification de faire un effort :
ainsi le mot latin studeo ( s'appliquer à , avoir du goût pour ,étudier)
traduit cette acception , comme studiosus ( qui a du goût pour ) .
Correspondants en français , on trouve studieux , étude , étudiant ,
étudier , puis studio etc...
Faire un effort en mauvaise part , c'est aussi le déshonneur , la
débauche ( stupra en latin ) et "stupre" en français

Avec le préfixe "per" qui veut dire dans ce contexte "à travers, de part
en part" , on a le verbe latin per-tundo ( littéralement "frapper en
traversant") qui a donné en français "pertuis" , percer , percement ,
percée etc...

Mais on n'a pas fini avec les sinuosités de la racine ! La machine à
broyer les olives s'appelait "tudicula" et le verbe était "tudiculare"
( broyer ,  mélanger ) , avec le "n" de "tundo" qui avait disparu  :

on a eu de cette tendance en ancien français tooiller ( s'agiter , remuer )

qui s'est progressivement transformé en touiller ( la salade ) , et

"ratatouille" ( écraser , mélanger différents légumes , avec un préfixe

"rata" d'origine incertaine )

 

Cela ressemble finalement à de la généalogie : au bout d'un certain
temps , tout le monde fini par être parent avec tout le monde ( ou
presque !) ..

 

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Etymologie : des suffixes "diminutifs" , de la renoncule à l'oncle

Il y a tout en ensemble de suffixes qui expriment une notion de diminution .

Citons les suffixes en -ette ou -et ( fleurette , mallette , lunette , cachette ,

casquette , facette , etc...etc..pour les suffixes en -ette , ruisselet , poulet ,

sachet , jardinet , oeillet etc...etc...pour les suffixes en -et) et les suffixes

en -elle ( ruelle , rondelle , prunelle , tourelle , Marcel qui est un petit

Marcus , agnelle , etc...etc...) .Il y a aussi les suffixes en -on ou -onne

( cabanon ,  chaton ,  aiglon ,  ourson ,  caisson ,capuchon , etc...etc ..) et

des suffixes en -eau ou -ot (lionceau , chevreau , rameau , barreau ,etc...

ou chiot , îlot ,  frérot , jeunot , vieillot , etc ...etc...) .Il y a encore les suffixes

en -ille ( brindille , faucille , bulbille , charmille , pastille ,écoutille etc...etc...)

ou ceux en âtre ( qui viennent du latin -aster , d'où l'accent circonflexe et qui

expriment une notion de "pas tout à fait" ,  "presque" , comme  jaunâtre , 

bleuâtre ,verdâtre , bellâtre , marâtre , mais qui peuvent aussi plus rarement

présenter un aspect"augmentatif" comme opiniâtre ) .
Enfin les suffixes en -ule ou -cule ne sont pas toujours aisés à repérer . Ils

viennent du latin -culus , comme venticule , particule , corpuscule , opuscule

, pellicule et cuticule( petitepeau ) , etc ...

 

Parmi ceux qui sont moins aisés à repérer , citons :
spéculer et spécule ( petit "spes" , c'est à dire petit espoir )
molécule ( petite moles en latin , c'est à dire  petite masse )
renoncule ( petite "rana" , c'est à dire petite grenouille )
minuscule et majuscule ( petit parmi les petits pour le premier , un "petit peu

plus grand" pour le deuxième ).
circuler et circule : aller en cercle ; ici la notion de petitesse vient de "cercle"

lui-même :cercle vient du latin "circulus" , lequel se déduit par diminution de

"circus" ( cirque ) . Un cercle est un petit cirque , et circuler est se déplacer

suivant ce "petit cirque" ....

clavicule est une petite "clavis" , soit une petite clé ou un petit clou .( avec de

l'imagination...)

spectacle est une "scénette" : il vient de spectare ( regarder ) , complété par

culus élidé de son "u" .

 

Parmi d'autres encore plus étonnants , on trouve :
crépuscule : c'est une  "petite obscurité " ( de "creperus" , obscur en latin) .
couvercle : le "u" de "culus" s'est élidé ( comme dans "cercle") et  le mot vient

de la racine cooperire ( couvrir ) ; un couvercle est un "petit" objet qui couvre .
habitacle est un petit habitat ( toujours l'élision du "u" de "culus") ..
pinacle est un petit "pinna" , soit un petit "créneau" sur les remparts .

Citons encore : Canicule ( canis : chien  +  culus ) , soit "petit chien" ; ce nom

est en rapport avec la constellation du grand chien , qui apparaît dans le ciel 

vers  le début  du mois  d'Août ,  à  la  période  sans doute la plus chaude de

l'année . Canicule ( petit chien ou petite chienne ) était le nom romain  de

Sirius , l'étoile principale de cette constellation , de sorte que son apparition

dans le ciel coïncidait pour les romains avec une période de très forte chaleur.

 

Le moins repérable de tous est sans doute "oncle" , de unculus en latin , soit étymologiquement :
"avus" ( grand-père) + "culus" , pour aboutir à la signification primitive de

"petit grand-père"

Dans les relations sociales de l'époque où s'est formé le mot "unculus" ( soit

environ mille ans AJC ), la société est sans doute très patriarcale , et le

grand-père a encore un rôle dominant par rapport à l'oncle ...

phirey@free.fr

 

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De Montaigne à Montesquieu et Nietzsche : Le mieux est l'ennemi du bien


Dans un ouvrage sur Montaigne , Marcel Conche écrit :
" Montaigne a pris conscience de l'impossibilité de fonder , par la seule voie que

connaisse la philosophie ( celle de la justification par la raison ) , une vérité

quelconque au sujet de la nature  de  l'homme . Il n'y  a  pas  de vérité sur

l'homme accessible à l'homme . Il n'est pas possible de dépasser ici le domaine

de l'opinion " ( "Montaigne ou la conscience heureuse"    p  42) .
Cela rejoint l'aphorisme de Lao Tseu déjà cité dans l'article précédent :
"Ne  pas  savoir ,  c'est  savoir , voilà l'erreur ,  savoir ,  c'est  ne  pas  savoir ,

voilà l'excellence "
Montesquieu lui répond : " Le mieux est l'ennemi mortel du bien " , ( d'où le

proverbe : le mieux est l'ennemi du bien ) ou encore " Vérité dans un temps ,

erreur dans un autre ".

Quant-à Nietzsche , il déclare :
"Les convictions sont des ennemis de la vérité plus dangereuses que le

mensonge "
Montaigne pourrait conclure en disant : quand on veut ériger une vérité relative ( une "opinion") en vérité absolue , on est près de la catastrophe : voir l'Inquisition , les guerres de religion que Montaigne a bien connues, et tout autre manifestation où pour le "bien" général des personnes on aboutit à des massacres dans les cas particuliers ...
Dans ce sens , on peut aussi entendre la maxime latine : " summum jus , summa injuria "
( attribuée à Cicéron , qui la reprend dans "le traité des devoirs " ) , et qu'on

peut traduire par : Comble de droit , comble d'injustice
ou encore le propos de Pascal : " qui veut faire l'ange fait la  bête "
Dans le "purisme de l'orthodoxie " , il y a un vertige qui précipite la chute . et

l'obsession du "mieux" doit nous amener à nous interroger sur la manière

dont nous vivons "l'imperfection" , le "manque" ....
De la sorte , le mieux peut bien être considéré comme "l'ennemi mortel" du

bien .Pour saisir encore avec plus de signification ces opinions de

Montesquieu ou de Nietzsche , rappelons la phrase de Niels Bohr qui affirme

( à propos de la physique quantique , mais aussi avec une portée plus

générale - cf précédent article sur ce site ) :"Le contraire d'une vérité banale

est une erreur , le contraire d'une vérité profonde est une autre vérité

profonde "

Aller au-delà d'un certain degré dans le domaine d'une vérité profonde c'est

, comme dit Pascal , "faire la bête" , c'est vouloir ériger en Absolu ce qui n'est

que du domaine de l'opinion , c'est ne voir qu'un aspect de la situation , c'est

bousculer la "vérité profonde " contraire à la première en voulant l'imposer

comme seul point de vue . Qui veut faire l'ange ne fait peut-être pas

nécessairement la bête , il entre en tout cas dans un domaine où il n'y a pas

de demi-mesure , où il est tout entier dans sa "vérité" , c'est à dire au sens

premier du terme qu'il entre dans le domaine de l'intégrisme , le domaine des

oeillères. Ceci illustre encore ce qui était développé dans le précédent article ,

où à partir d'Héraclite et de Lao Tseu , nous pouvions constater qu'une "vérité"

n'est pas antinomique de contradictions mais qu'elle est plutôt un point

d'équilibre entre des principes et des forces "contraires" qui se complètent ou

s'opposent , que tout mouvement ou  toute  vie  se fait à partir de potentiels

contraires .

Il peut sembler , en définitive , qu'"assumer ses contradictions "

est une position plus réaliste que de ne pas avoir de contradictions , et qu'en

cela c'est une position où se trouve un certain équilibre ( propre à chaque

personne ) entre des "vérités profondes et contraires " .

 

On peut conclure en revenant à Montesquieu :
"Le mieux est l'ennemi mortel du bien "
ou en rappelant les formulations  de Socrate : Plus je sais , plus je sais que je

ne sais pas , ce qui revient aussi d'une certaine manière à celle de Lao Tseu

déjà citée ci-dessus . 

 

Remarque : Le fait que dans l'esprit de ces auteurs des "vérités profondes"

puissent s'opposer  , que le nier puisse être "mortel" et qu'il revient à chacun

de trouver  le niveau  d'équilibre où  il place le curseur entre un grand nombre

de principes"opposés", ne  signifie  pas pour autant que tout est "relatif , que

toute position est justifiable , que tout se vaut et que "tout  est pour le mieux

dans le meilleur des mondes possibles " .

IL y a des "vérités profondes" , les sciences et les technologies nous en

démontrent constamment l'existence , mais dans la nature ,  dans le monde

physique , c'est aussi constamment  un jeu d'équilibre entre ces principes et

ces forces contraires , entre le "yin" et le "yang", entre la pesanteur  et la force 

centrifuge ( qui fait tourner les planètes ) , entre une source chaude et une

source froide ( pour faire tourner un moteur , fonctionner un frigo ) , entre  la 

réflexion  et l'action , etc ..                        phirey@free.fr

 

 

 

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De l'Irremplaçable et de l'inlaçable

 

Buriner des propos de plomb

aux marbres de la statuaire ,

infliger des déclamations

sur les dalles des cimetières

 

Marteler des propos d'airain

sur le sable du jour banal ,

voilà ce qu'attend le refrain

sur l'antienne de la cigale

 

La vie va toujours au-delà

des cliquetis des falbalas ,

à se mêler aux pluies dansées

sur l'asphalte des rues mouillées

 

La vie est cet inextricable

intissé de mille couleurs

de tous ces desseins improbables

emportés d'élans créateurs

 

La vie est cette inespérance

qui va au-delà de l'espoir ,

la vie est cette exubérance

à mêler la blanche et la noire

 

C'est cet équilibre impalpable

d'une buée sur la croisée ,

de rêve aux coeurs des nuées

et de fantaisie inlaçables                 Juillet 2018

                                                      Perso à phirey@free.fr

 

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Hommage à Jean Vincent Verdonnet

De même que les poèmes en français de Rilke sont relativement peu connus ( cf précédent article de poésie ) , de même J V Verdonnet , qui est un des plus grands poètes contemporains , a une notoriété qui est restée modeste en dépit de l'exceptionnelle limpidité et de la profonde sensibilité de certains de ses poèmes .

En voici quelques uns , qui permettent d'en juger :

 

"La vie est ce bruit d'eau qui va

sous les feuillages où bat des cils

la lumière en chemin depuis

que le dedans et le dehors

existent par le mouvement

de leur respiration en nous " (Fugitif éclat de l'être )

 

 

" La vie reste au-delà toujours

de ce brouillard bleu des paroles

 

C'est ce brin d'herbe qui palpite

à ce qui n'a pas de visage

 

Et l'orgue du monde ne joue

que si le monde souffle en toi " (Fugitif éclat de l'être )

 

 

" La plénitude d'un silence

où l'infini sur une branche

un instant viendrait se poser "

 

 

"Il y a parfois

à respirer sous le ciel

une grandeur

à celle du bleu pareille

 

par-dessus ton épaule

l'âme regarde et se repose

si proche

qu'on pourrait la toucher

 

Comme au temps

de l'ange à l'enfance

fumée de neige

au bord des toits "

 

" Du prix que payèrent les siècles

la ruine est là pour témoigner

écharde obstinée à survivre

au bord du sentier muletier " (Droit d'asile)

 

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Des vérités et des contradictions : De Protagoras , Héraclite et Lao Tseu à Montaigne et Wittgenstein

Cette opposition entre vérité et contradiction  est très ancienne ; on peut rappeler les termes
d'Héraclite : " Panta rhei " ( tout coule , c'est à dire tout change , tout évolue , et la conséquence : rien n'est stable , il n'y a pas pour l'homme de vérité absolue) , ou encore :  "on ne baigne jamais deux fois dans le même fleuve" ( on ne voit jamais deux fois une chose de la même manière ) , ou celle de Protagoras :
" l'homme est la mesure de toutes choses " ( c'est à dire qu'en toutes choses , il n'y a que des points de vue humains , qui en mesurent les effets à leur aune , un peu à la manière de dire : " vos jugements vous jugent " ) .
De la sorte , tout étant instable , inconstant , contradictoire , il n'y a pas de vérité en soi , pas de vérité intrinsèque , absolue , il n'y a que des "vérités relatives".

Cet manière d'entrevoir une certaine forme de logique se retrouve dans le raisonnement mathématique , qui dit qu'à partir de deux points de départ , deux axiomes contradictoires , on peut démontrer que n'importe quoi est vrai ou faux : si 0 = 1 , alors 0 = 1+0 = 1+1 = 2 , puis 0 = 3 = 4 =......=6350 = le diamètre de la terre , donc le diamètre de la terre est nul , la terre n'existe pas , etc ..etc ..
Cependant  ce mode de raisonnement , s'il est vrai dans le domaine mathématique  limité au principe du tiers exclu ( qui dit qu'entre une appréciation vraie ou fausse , il n'y a pas d'intermédiaire , il n'y a pas de demi-vérité ,  deux droites sont parallèles ou ne le sont pas ) , il devient assez aléatoire dans le domaine philosophique où se placent ces deux penseurs : si tout est relatif , leurs appréciations mêmes sont relatives , c'est déjà  le paradoxe du crétois ( qui dit que tous les crétois sont des menteurs -- donc en particulier lui-même ) : s'il n'y a pas de vérité stable , si tout est inconstant , leur propos mêmes sont instables , inconstants , sujets à caution .
Toutefois , notons qu' Héraclite semble dépasser cette contradiction , lorsqu'il affirme que
" le chemin du haut et le chemin du bas mènent au même endroit " : il y a donc un endroit où les chemins convergent , et si tout est relatif dans les chemins et les fleuves intermédiaires , il y a finalement convergence dans une étape ultérieure .
Cette conception même nous est assez  familière depuis plus d'un siècle : Dans le domaine quantique des particules élémentaires, nous savons que si tout bouge , si tout est inconstant , il y a finalement un équilibre et des formes de convergence qui apparaissent au niveau  où nous vivons : à ce niveau il y a des éléments chimiques stables , des tables et des chaises , les voitures roulent , et tout ce que nous pouvons observer dans la vie pratique a une certaine réalité concrète ; on dit qu'il y  a  "décohérence"  pour  signifier  que  l'instabilité au niveau quantique cède la place à une certaine stabilité au niveau où nous vivons , avec des formes de convergence qui assurent ce minimum de stabilité .
De même , dans les domaines biologiques , sociétales , politiques , etc .. nous observons qu'entre des forces contradictoires se manifestent des équilibres et des convergences qui dessinent certaines vérités :
entre des herbivores et leurs prédateurs , il y a des équilibres qui apparaissent , entre des plantes colonisant un biotope et tendant à s'exclure les unes des autres il y a un état d'équilibre "climax" qui s'instaure ( par exemple en France  dans trois quarts du territoire  ,  c'est une forêt de chênes qui doit finir par s'installer  avec un cortège de végétaux spécifiques , sur un sol qui est un "sol brun "-- si on laisse à la biocénose le temps d'évoluer jusqu'à son stade d'équilibre) .  
Entre pour ou contre le Brexit , la mondialisation , les conservateurs et les adeptes de changement , etc..etc.. , il y a des équilibres et des formes de convergences qui se mettent en place :
" la guerre , le conflit est le père de toute chose " dit encore Héraclite : ce sont les oppositions qui sont sources des "compromis" , des accords et des équilibres qui se  mettent en place .  
 
Cette notion "d'affrontement" de contraires qui crée le mouvement nécessaire à la vie , est aussi une notion  scientifique familière :
la thermodynamique par exemple l'illustre en affirmant par son second principe( principe de Carnot ) que tout moteur ne peut fonctionner qu'entre deux sources de chaleur (il doit y avoir une différence de potentiel thermique si l'on veut que le moteur fonctionne ) ; de même , pour qu'il y ait un courant électrique , il doit y avoir entre les bornes du circuit une différence de potentiel( c'est habituellement du 220 volts ) ;
pour qu'il y ait un courant d'air , il doit y avoir une différence de pression atmosphérique ; vous chutez dans un escalier parce que vous êtes dans un champ de gravité qui engendre une différence de potentiel gravitationnel , etc...etc...  : tout mouvement est engendré par  un  "conflit"  entre  deux  potentiels différents , toute vie ne peut être qu'engendrée par un mouvement ,  toute vie ne peut naître que d'un "conflit" , d'une contradiction  ( mais tout conflit n'est pas nécessairement source de vie ! ..) : et la vie , les vérités ,les mouvement observés sont le résultat de l'équilibre qui   s'obtient entre les forces , les potentiels contraires , les contradictions qui se manifestent .

Notons que ces concepts de contradictions qui engendrent du mouvement et de la vie sont également soutenues par Lao Tseu pour lequel les contraires sont plus des complémentarités que des antagonismes :
les vérités observables sont le résultat d'équilibre entre ces contraires , mais comme on peut penser qu'Héraclite va plus loin dans la formulation que Protagoras (qui se cantonne dans une position agnostique) , on peut également estimer que Lao Tseu dépasse les interprétations d'Héraclite ( souvent très brutales ) en attirant l'attention sur le fait que des affirmations trop catégoriques sont souvent sources de conflits et que tous les conflits ne sont pas nécessairement sources "d'équilibres" :  attention , dit-il ,
" Savoir , c'est ne pas savoir , voilà l'excellence ; ne pas savoir , c'est savoir , voilà l'erreur "
Le véritable savoir , ce n'est pas uniquement d'observer les règles d'équilibre qui interviennent entre des principes contraires , on aboutit souvent de la sorte à des dogmatismes qui gèlent et figent la pensée .
Le "savoir" , c'est de porter en soi ces contraires et les interrogations qui en découlent , le plus
longtemps possible . Le véritable savoir est fait d'observations et d'interrogations , c'est  une attitude d'esprit , un cheminement , un apprentissage à marcher dans des directions qui n'ont pas de fins .
On pourrait conclure par ces propos de Jean Rostand :
"Peu de gens sont dignes de ne croire à rien "
ou cette interrogation de Montaigne " Que sais-je ? " , qui rejoint bien celles de Lao Tseu ,
ou encore la prudence de N. Bohr :
" Le contraire d'une vérité profonde est une autre vérité profonde "
ou finalement celle de Wittgenstein :
" mes propositions sont clarificatrices , en ce sens que celui qui les comprend les reconnaît à la fin pour des non-sens . Si passant par elles , au-delà d'elles , il est monté pour en sortir ,  ...alors il voit le monde de manière plus juste "

                                                                                      phirey@free.fr

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