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Rudyard I

Et quand à trop courir on vient à discourir

et qu'à trop discourir on devient discoutois

quand la cacophonie veut imposer sa loi

d'autant plus intangible qu'éphémère à blêmir

 

Quand on est  à la fois la question , la réponse

-- quand les questions n'ont plus qu'à être La Question --

Quand le must est le vent de la parole absconse

à changer de registre au gré des girations

 

Quand le bruit des propos à recouvrir les actes

telle une avalanche devient L'Evènement

quand sous les grondements de cette cataracte

la pensée disparaît sous cet aveuglement

 

Si tu sais tout cela sans jamais être en rage

si tu sais être brave et aussi être sage

si tu sais t'amuser de ces aérophages

Alors tu seras un homme mon fils

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Des climats et des théories

On parle depuis une cinquantaine d'année de l'effet papillon , qui voudrait qu'un battement d'aile d'un papillon au Brésil pourrait déclencher une tornade au Japon : le climat serait un "système chaotique" , et un moindre écart dans les mesures d'un paramètre pourrait très vite avoir des répercussions incontrôlables .

Ceci nous ramène toujours à la différenciation qu'il peut y avoir entre la théorie et l'application de la théorie à une situation déterminée ; aussi parfaite soit la théorie , son adaptation à la réalité , la représentation de cette réalité par un système qui en est un "modèle", pose toujours de multiples problèmes car de nombreux grains de sable peuvent se glisser dans cette belle mécanique et en altérer "quelque peu" les conclusions .

En gros , un modèle est une tentative "d'imiter la réalité" , mais on sait bien qu'on peut tenter d'imiter autant qu'on veut un phénomène sans pour autant le reproduire , ou reproduire plutôt un "monstre" ( cf Marie Shelley ) , quand de grain de sable en grain de sable on s'éloigne de plus en plus de l'objet étudié ( un grand voyage commence par de petits pas – proverbe chinois – de grosses erreurs commencent par de petits grains de sables – proverbe personnel )

 

Que prévoit la théorie du chaos déterministe ?

Basée sur des études extrèmement rigoureuses , la théorie établit que dans le cas de certains systèmes d'équations algébriques ( assez souvent des équations différentielles , mais pas que .. ) , de petites modifications des conditions initiales peuvent être multipliées par 10 au bout d'un temps t fixe , dit temps caractéristique du système :

ainsi , au bout de 2t , la modification est d'un facteur 10x10 , au bout de 3t la modification est de 10x10x10=1000 ; pour atteindre une modification d'un facteur d'un million il ne faut que 6t , d'un milliard il ne faut que 9t , etc...

De la sorte , au bout d'un temps assez court , on conçoit que si le système climatique est "chaotique" un battement d'aile d'un papillon au Brésil , multiplié par des facteurs de milliards de milliards au bout de 12t à 14t , puisse provoquer une tornade au Japon .

Mais le problème est bien de savoir si le système des équations qui représente le climat ( système qui lui est bien parfaitement chaotique ) est  un modèle qui représente parfaitement le climat :

et là , la réponse est bien entendue non . Les systèmes climatiques , à l'inverse de certains systèmes algébriques , sont des systèmes qui se "régulent" assez vite ( quoique..) : les caractéristiques d'un climat continental sont bien connues , celles des climats océaniques , méditerranéens également ( exemple pour un climat méditerranéen : sécheresse en été et en hiver , périodes pluviales au printemps et en automne , avec des variations de précipitations de l'ordre de 500 à 800 mm d'eau par an , liées à l'exposition , à l'altitude , etc .. )

Ainsi , modéliser les climats par des systèmes "chaotiques " aboutit à des prévisions ..................  "chaotiques"

( comme le dit un autre proverbe perso , quand on a l'esprit de travers , on voit tout ce qui est droit .... de travers ) : en définitive , ce qui est "chaotique" est bien les prévisions que nous pouvons réaliser , pas le climat lui-même ..... Comme on dit dans certaines sphères philosophiques , attention de ne pas "trop" anthropomorphiser les choses , nos prévisions ne prévoient .... que l'insuffisance de nos capacités présentes à faire mieux ( mais d'énormes progrés ont déjà été réalisés )

En résumé , nos jugement nous jugent et sont le miroir de nos capacités, à "trop" vouloir anthropomorphiser des situations pour l'instant imprévisibles , on crée des dieux ( Eole , Jupiter .... ) ou des théories qui remplacent les dieux ( mais théos , c'est déjà dieu .... ) , et qui décident du chaos du climat

 

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"Généalogie de la morale" (2) (Nietzsche)

Dans "Généalogie de la morale" , Nietzsche a présenté quelques éléments de nature étymologique pour étayer ses propos ; ainsi insiste-t'il sur le fait que presque tous les mots qui s'appliquent à l'homme du commun ont fini par évoluer en expressions signifiants "malheureux" , "à plaindre" " .

Il donne comme exemples :

"deilaios" , qui en grec ancien veut dire "infortuné" , et "deilos" qui veut dire "misérable"

"ponèros" veut dire à la fois " en mauvais état" , et "méchant , pervers"

"mochtèros" veut dire à la fois "infortuné" et "méchant , pervers"

"oizyros" est pour "qui se lamente" et "lamentable"

en allemand , "schlicht" veut dire "simple" et "schlecht" : mauvais

La conclusion s'impose : ce qui est simple et pauvre est mauvais .

 

On peut poursuivre la liste qui corrobore le fait que l' "homme du commun" , de "pauvre" est

souvent associé aux sens de "malheureux" , "misérable" , "méchant , mauvais" :

"kakos" ( en français : cacophonie) veut dire à la fois "de base origine" et "mauvais , laid ,

discordant"

"ptochos" veut dire pauvre , "ptosis" : chute ( notons au passage que "sunptosis" est ce qui "tombe" ensemble , donc ce qui arrive ensemble , c'est à dire littéralement une "co-incidence" : d'où en français .... le mot d'origine grec : symptome ; et ce qui n'arrive jamais ensemble est "asymptote" , le "a" est privatif en grec )

en latin , "vilis" ( commun , bon marché ) est aussi vil et bas ; en français on a sur le même thème "vilain"

en français , l'objet de "pitié" est devenu "pitoyable"

ce qui n'est pas "noble" , c'est à dire le commun des mortels , est "ignoble".

un simple "profane" peut faire des "profanations" ..... etc.....etc

 

Finalement , il vaut mieux être riche et en bonne santé que malheureux , pauvre , méchant et même diabolique ! Cela va même beaucoup plus loin que ça :

Quelqu'un de riche et en bonne santé n'est pas que cela , il fait partie de la hiérarchie , de

l'aristocratie :

"hiéros" en grec veut dire "sacré" : d'où hiéroglyphe ( "écriture sacrée" ) et ... hiérarchie : la

hiérarchie n'est donc pas qu'un simple ordre social , administratif , etc : c'est un ordre SACRE ; qui conteste la hiérarchie conteste aussi un ordre sacré et commet un SACRILEGE , ce qui est bien entendu gravissime ....

A un degré moindre d'autosatisfaction , il y a "aristocratia" , qui est le pouvoir ( "cratos") des

meilleurs ( "aristos") (Notons au passage que le nom Aristote et le prénom équivalent veulent aussi dire "le meilleur" ) . Là , on est redescendu d'un cran dans les qualificatifs : le pouvoir n'est plus de droit divin , il n'est que celui des meilleurs ...

 

Autre constatation de nature étymologique : l'argent ne fait pas le bonheur ..... mais y contribue : Ainsi par exemple :

le mot "estime" vient de "aes" ( airain , monnaie d'airain ) , ce qui signifie qu' à cette époque

"l'estime" était portée à ceux qui avaient la richesse , et que la véritable "estimation" d'une personne était son poids financier .

Il en va à peu près de même pour "valeur" : le mot provient du latin "valeo" ( être fort , capable ) ; qui est "validus" en latin est "fort" , et "valentia" est la vigueur , la vaillance ; en allemand , celui qui a de la valeur est celui qui gouverne ( "walten , qui a la même origine que valeur , veut dire : gouverner , régner ) . Ainsi avoir de la valeur signifie qu'on est "fort" .

En grec , celui qui était "heureux" était celui qui avait de la fortune et des richesses ( "olbos" a les deux sens ) ; de même actuellement en français , le mot "fortune" , qui initialement avait aussi bien le sens de bonne fortune que de mauvaise , a vite pris un sens qui correspond maintenant à "fortuné " ; .. etc...des exemples de ce type peuvent multipliés presque indéfiniment .......

 

Le problème est que ces remarques étymologiques sont valables pour toutes les époques et qu'elles ont le même retentissement de nos jours que par le passé , chez les grecs ,les romains et autres indo-européens plus anciens , que dans nos civilisations contemporaines ....... Il y a une certaine continuité de comportement au fil du temps .....

Mais ce qui est intéressant est de voir qu'il y a un au-delà du discours , et que cet au-delà des

discours est inscrit dans les mots utilisés : quelle que soit la teneur des théories , il y a le

"subconscient" des mots qui s'exprime comme un ADN , et qui nous dit : attention au mirage des théories , si le discours dit ceci , l'ADN et le subconscient disent cela .

 

Enfin , l'ADN des mots et le subconscient qu'il exprime , n'exprime pas non plus que cela :

Nietzsche paraît s'arrêter à cette première approche , ce qui peut sembler quelque peu réducteur .

Poursuivons au-delà de ces premières constatations la recherche dans l'étymologie des mots et des pensées sous-jacentes qui sont véhiculées :

Par exemple , la racine indo-européenne du verbe "être" ( qui se partage comme Heidegger l'a bien noté en trois ou quatre racines secondaires ) est pour la première le radical "es" :

c'est "esse" en latin , qui se prolonge avec toute une gamme de suffixes et éventuellement

effacement du "e" , dans des termes comme : je "suis" , tu "es" , il , elle "est" , her "ist" en allemand , she "is" en anglais etc..

Dans cette série de dérivation , nous trouvons aussi le latin "sons" ( qui veut dire : coupable ) ,

l'anglais "sin" ( péché ) et "sooth" (vérité , justice droiture ) , le latin essentia (essence) , le grec "esthlon" ( bon , profitable) et "eteos" (vrai ) , le sanskrit "sat" ( vrai, bon) et "satyas" (bien

être ) : c'est ainsi qu' on trouve un peu de tout , du "péché" originel au "bon" et au "bien être" , de l'"essence" au "vrai" , à la "justice et la droiture" ... soit une trés grande diversité de sens qui échappe au "manichéïsme" de l'étymologie de Nietzsche .

Dans la façon d'"être" ,On peut "être" aussi bien en son "essence" qu'on est "bon" ou "pécheur", qu'on est "vrai" , "droit" ou "coupable" : on n'est pas que "bon , puissant" d'un côté , et "pauvre , misérable et coupable" de l'autre .

Autre exemple avec les mots "morale" et "éthique" :

"moralis" en latin veut dire : relatif aux moeurs ; il dérive lui-même de "mos" ( moeurs , coutume ,

tradition , conduite , manière d'agir ..) , qui a donné en français aussi bien "morose" que "moeurs" , "morigéner" , etc ...( beaucoup de connotations possibles !) .

"ethicos" veut dire en grec "moral" , "ethos" veut dire "caractère habituel" , "etho" : avoir coutume de , être habituel , "ethnos" : personne familière , les siens , etc ...

L'éthique , la morale ( et le bien , le juste ) se rapportent donc à ce qui respecte la coutume et l'usage pour les grecs et les latins , du moins dans le sens originel des mots , ce qui somme toute n'est pas très différent de nos conceptions contemporaines : le "juste" est ce qui respecre la loi , qui à son tour codifie les usages "bons" ou "mauvais" pour la société ..

 

L'étymologie ne fait donc pas "complètement" apparaître la dualité que Nietzsche met en avant , elle donne des résultats beaucoup plus divers qu'il ne l'indique , et plonge finalement ses racines dans les façons de vivre des gens aux époques concernées , des usages et des ressentis : variés , mais aussi évolitifs , contrastés . La "généalogie de la morale" , sous le prisme de l'étymologie , est aussi et surtout de "l'ethnologie" avant d'être de "l'éthique" .

Nietzsche aurait du savoir qu'en faisant fonctionner la "trieuse" ( ne choisir que des exemples qui confirment ce qu'on veut montrer ) , on arrive à prouver tout ce que l'on veut ...

 

 

 

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Richard II

 

Richard II

 

Quand la police des consciences

se confie à des bateleurs ,

ah , coupez en morceaux la France ,

je reste roi de mes douleurs

 

Quand les mots perdent tous leurs sens

de surenchère en surenchère ,

il reste les cendres amères

l'exhibition et l'indécence

 

Quand un très sémillant Dandin

s'en va excommunier Charlie

de poudres de Perlin Pimpin :

Restez roi de vos infamies

 

Quand "on" accable de péchés

un "Notre Père" aménagé ,

l'instant suspendu à tes lèvres

n'attendait plus que toi pour vivre

 

Quand Finkielkraut est qualifié

d'ectoplasme à mettre au panier :

gardez vos propos dégradants ,

vos jugements disqualifiants

 

De quelques noms qu'on remercie

Censure ou bien Anastasie ,

quand le vitrail devient vitreux

reste le cauchemare en creux

 

Quand Daumier à la queue-leu-leu

fait défiler le panurgisme

élégant de tous les snobismes ,

restez-y , Nobles Depuipeu .

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Généalogie de la morale (1)

 

"Généalogie de la morale" ( Nietzsche )

 

Dans cet ouvrage considéré par certains comme un chef-d'oeuvre , Nietzsche élabore une réflexion sur l'apparition et le développement de la morale à partir de matériaux étymologiques , de considérations historiques , dans le contexte des années 1880 : Que peut-il bien en rester près d'un siècle et demi plus tard ?

On le verra par la suite , ses considérations étymologiques sont partielles et partiales ( cf le deuxième article en "étymologie" ) , ses considérations sociologiques et historiques tout autant

Mais le propre de grands auteurs étant souvent d'avoir eu des intuitions dépassant le cadre des structures et des matériaux fragiles dont ils disposaient , voyons un peu si Nietzsche a su extraire "l'universel" de ce dont il avait connaissance .

Voici par exemple comment Nietzsche décrit les rapports intra-communautaires ( p 87 Livre de Poche ) :

" Ces mêmes hommes auxquels la coutume , la vénération , l'usage , la reconnaissance et plus encore la surveillance réciproque , la jalousie , imposent des limites si sévères inter-pares ( ie "entre paires" ) , qui se montrent en outre dans leurs relations mutuelles si inventifs en égards , en domination de soi , en sens de la délicatesse , en fidélité , en orgueil et en amitié – ne valent guère mieux , quand ils entrent en contact avec l'extérieur , là où commence l'élément étranger , le pays étranger , que des bêtes de proie déchaînées . Ils y savourent la libération à l'égard de toute contrainte sociale , ils se dédommagent dans cette étendue sauvage de la tension résultant d'une longue réclusion et mise en cage dans la paix de la communauté , ils reviennent à l'innocence de conscience qui est celle de la bête de proie , en monstres transportés d'allégresse , laissant peut-être derrière eux une abominable succession de meurtres , de destructions par le feu , de profanations , de tortures , exubérants et l'âme égale comme si cela n'avait été qu'une blague d'étudiants , convaincus d'avoir redonné aux poètes , pour longtemps , matière à chanter et à célébrer "

On conviendra qu'il faut souvent chez Nietzsche faire la distinction entre la forme poétique et métaphorique portée par une certaine exaltation , et le fond de la réflexion .

Nietzsche poursuit , dans un contexte plus général cette fois :

" Il n'y a pas à s'y tromper ,... , ce fond caché a besoin de se décharger de temps en temps , il faut que l'animal sorte de nouveau , qu'il retourne à l'étendue sauvage -- noblesse romaine , arabe , germanique , japonaise , héros homériques , vikings scandinaves – eu égard à ce besoin , ils sont tous identiques . Ce sont les races nobles qui ont laissé le concept de "barbare" sur leurs traces partout où elles sont passées .... elles en ont conscience et même en tirent orgueil "

Puis enfin , il revient au contexte local , "euro-européen" :

" La méfiance profonde , glacée , que suscite l'Allemand dès qu'il accède à la puissance , de nos jours aussi – demeure toujours une résonance atavique de cette horreur inextinguible avec laquelle , des siècles durant , l'Europe a été témoin de la furie de la bête blonde germanique ( bien qu'il existe à peine une parenté conceptuelle , pour ne pas parler de parenté de sang , entre les anciens germains et nous , les Allemands ) "

Nietzsche dénonce donc on ne peut plus clairement un certain nombre d'exactions , propres à tous les pays et toutes les époques , pour qu'on ne puisse pas lui faire un procès d'intention à ce propos .

 

Revenons au premier paragraphe ci-dessus ; Nietzsche y dénonce , à sa façon , la manière dont fonctionnent souvent les communautés , à échelle historique : Réclusion et enfermement sur soi , édification de règles , de codes plus ou moins opaques , récitations de conformismes plus ou moins arbitraires , pratiques de l'auto-célébration et de l'auto-immunité , comme le rapporte d'ailleurs Schopenhauer à la même époque dans "L'art d'avoir toujours raison " : c'est à dire une langue de bois inconditionnelle , une "xyloglossie" à toute épreuve , qui réquisitionne le débat , l'enferme dans ses prérequis , ses interdits , sa bien-pensance : Interdit d'avoir une opinion personnelle , imprimatur exigée auprès d'un chef ou d'un "procureur" , totems et tabous un peu partout , aux quatre coins du pré carré , etc ,etc ... on peut continuer pendant des heures

Bref , Nietzsche nous rappelle que la vocation du penseur est de penser , et que , même s'il ne savait pas qu'étymologiquement "barbare" veut dire "étranger", il nous incite à ne pas "aliéner" la pensée à quelque groupe que ce soit ; comme le montre Yvan Attal dans "Le Brio" , on peut parler de tout , en toute simplicité , sans braver les foudres de qui que ce soit . La conclusion pour Michel Serres : "j'ai une horreur quasi physique de la libido d'appartenance "

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